La tâche difficileL’arrivée du Borrego, le nouveau VUS intermédiaire de Kia, semble très mal jugée. Vous en conviendrez qu’introduire un gros VUS n’est possiblement pas la démarche à suivre la plus songée par les temps qui courent avec un litre d’essence qui frôle le 1,50 $. Par contre, vous devez réaliser que la création et le lancement d’un tout nouveau véhicule ne se produisent pas du jour au lendemain.
Du moment où l’idée est mise sur la table, en passant par les croquis, la conception, les essais et la production, plusieurs années peuvent s’écouler. Initialement, l’idée d’un VUS avec ce type de gabarit semblait une excellente manière pour Kia d’étoffer sa gamme de véhicules nord-américains; ce segment étant (jadis) un des plus lucratifs.
Maintenant, c’est un fait accompli et malgré un timing peu favorable, un point demeure indéniable; même si les ventes de VUS de ce créneau sont à la baisse, il n’en demeure pas moins que pour un grand nombre de consommateurs, l’idée d’avoir un gros véhicule représente toujours une nécessité.
Par exemple, lorsqu’on quitte nos milieux urbains et qu’on se transpose en Alberta, où se déroulait la présentation du Borrego, il est évident que la capacité de remorquer une charge en plus de transporter des personnes et leurs effets est une nécessité. Nous n’avons qu’à prendre l’autoroute transcanadienne et remarquer à quel point le besoin de tirer une remorque est non seulement un style de vie, mais aussi une manière de subsister.
Par contre, le choix demeure vaste quand vient le temps de se procurer un VUS. Les constructeurs américains et japonais ont depuis longtemps conquis le marché. Alors, comment Kia pourra-t-elle imposer son véhicule qui se mesurera à des produits déjà bien établis tels l’Explorer de Ford, le 4Runner de Toyota et le Durango de Dodge? Le Borrego s’imposera en répondant au problème de ce segment; la consommation d’essence.
Kia ne s’est pas contenté de seulement offrir, tout comme la majorité des concurrents, des moteurs V6 et V8, mais ils sont parmi les plus puissants et économiques du lot. Le V6 de 3,8 litres est déjà en service sous le capot du Sorento et de la Sedona, en plus des Genesis, Veracruz, Azera et Entourage d’Hyundai. Ce V6 propose 276 chevaux pour le Borrego et est en mesure de combler 90 % des besoins que pourraient ressentir les propriétaires de ce véhicule. Kia offre en option leur premier V8, un 4,6 litres, que l’on retrouve uniquement chez la Genesis. Ce huit génère 337 chevaux et c’est évidemment son couple supérieur (323 contre 267 (V6)) qui justifie sa présence. Le V6 compose avec une boîte à cinq rapports et le V8, six rapports, toujours automatique et avec mode manuel.
Les capacités de remorquage sont égales ou supérieures à celles de la concurrence et encore une fois, en considérant que la consommation devrait être inférieure, l’attrait du Borrego prend de l’ampleur. J’ai pu en faire l’expérience alors que Kia eut l’ingénieuse idée d’accrocher un bateau de vingt-cinq pieds à un Borrego EX-V6. Le poids de la remorque s’approchant de la capacité maximale de 5 000 lb, le V6 travaillait fort, mais a tout de même réussi à franchir des routes montagneuses des Rocheuses. Dans ce cas-ci, un V8 aurait été préférable vu l’avantage du couple et le rapport supplémentaire de la boîte. À cette fin, le combo V8 et automatique à six engrenages est particulièrement docile; à 100 km/h, le moteur révolutionne qu’à 1 600 tr/min et même à 120 km/h, ne dépasse pas 2 000 tr/min.
Il est en partie là le secret de la consommation modique des moteurs. Le V6, à vitesse constante, ne laboure à peine plus. Par contre, en matière d’accélération pure, l’étagement des rapports veut que le passage de la première vitesse à la seconde fasse chuter les révolutions des moteurs de près de 2 000 tr/min; bon pour la consommation, mais moche pour les départs rapides (que l’on devrait éviter de toute manière).
Bon, assez parlé des groupes propulseurs, passons à l’habitacle. Ce dernier est typiquement coréen; bien assemblé et proposant une ergonomie bien jugée. Chez le Borrego, les matériaux sont d’une qualité plus qu’acceptable et le plus gros point positif, autre que l’espace abondant, est le confort des sièges des deux premières rangées. La troisième banquette, de série, peut servir à accommoder deux adultes de tailles moyennes si le besoin se fait vraiment sentir. Les différences entre le LX de base et l’EX, plus étoffé, se résument par le cuir, le toit ouvrant, la climatisation automatique, les sièges électriques et une colonne de direction inclinable et télescopique électrique.
Esthétiquement, l’EX reçoit des jantes de 18 pouces (LX : 17 pouces), des phares antibrouillards et un peu plus de chrome. Aussi, un système 4X4 déverrouillable est de série chez le LX tandis que l’EX est doté de la traction intégrale aussi avec une boîte de transfert à deux rapports.
Sur la route, la tâche d’évaluer le comportement routier du Borrego est pénible. Évidemment, les routes de l’Alberta sont superbes et sur une belle surface, je peux confirmer que le camion roule très bien. Notre petite aventure nous a amenés à faire un petit trajet hors route qui a démontré que le Borrego peut aisément se débrouiller.
Par contre, le bitume n’était pas parfait par endroits et j’ai remarqué que le gros VUS semblait mal encaisser les irrégularités. À savoir, Kia a décidé de ne pas offrir une suspension à air à l’arrière sur leur Borrego; il est disponible en Corée. Pour le marché nord-américain, ils ont préféré raffermir les amortisseurs et les ressorts. Je crains qu’ils soient allés un peu trop loin Par contre, le cadre autonome semble particulièrement rigide, car à aucun moment n’ai-je entendu ou perçu un bruit de caisse; j’ai vraiment eu l’impression que le camion est solide.
Alors, Kia a une tâche difficile devant elle; elle doit surmonter l’image négative du VUS, se battre dans un créneau où les ventes sont en chute libre et de prouver que leur offrande est égal ou supérieur aux autres. À vrai dire, le Borrego ne présente pas de faiblesse évidente et peut s’insérer sans honte même parmi les Tahoe, Explorer et 4Runner. La question est : est-ce que l’appât d’une consommation annoncée inférieure sera suffisant?
Le Borrego est déjà disponible et Kia estime qu’ils seront en mesure d’en livrer entre 200 et 300 par mois dès maintenant.