Mitsubishi Lancer EVO 2008, enfin en sol Canadien.

[lang_fr]Je suis coupable. Eh oui, je l’admets, coupable d’avoir pensé et même écrit dans le passé que Mitsubishi n’aurait possiblement pas le succès voulu en Amérique du Nord. Ma langue tournée sept fois dans ma bouche, je vous annonce à présent ce que vous savez peut-être déjà : les affaires vont très bien chez Mitsubishi. Et comment? Dans une industrie où les ventes sont très volatiles, Mitsubishi s’est retrouvé au sommet du palmarès des marques en pleine croissance au Canada avec une augmentation des ventes de 53 %.

 

Bon, commençons par le début. Vous magasinez une nouvelle voiture. Ce faisant, vous considérez telle ou telle marque, n’est-ce pas? Déjà à cette étape, Mitsubishi a réussi à doubler le nombre de personnes qui les incluent dans leurs trois premiers choix de constructeurs de 2005 à 2007. Cette considération a donc donné l’élan aux livraisons fulgurantes de 2007. La raison principale du gain de popularité de la marque nippone est l’arrivée de la toute nouvelle Lancer. Cette voiture compacte a représenté 43 % des ventes totales de Mitsubishi en 2007.

Ce qui nous amène à la voiture testée : la Lancer Evolution. Ce bolide, cette voiture de course, cette machine de guerre qu’elle est aujourd’hui prend son origine dans la Lancer 2000 Turbo de 1981. En fait, la première Lancer EVO a vu le jour en 1992 comme modèle d’homologation pour que Mitsubishi puisse compétitionner dans le Groupe A de la WRC (World Rally Championship). La première EVO donna naissance à la deuxième et ainsi de suite jusqu’à la sixième, chacune d’elles réservées pour les marchés européens et japonais. Les versions VII à IX ont été vendues aux États-Unis, mais pas au Canada. Chose certaine, l’évolution (c’est le cas de le dire) a été constante en ce qui concerne les performances, la qualité et le comportement routier. Mitsubishi nous dit que la version X, ou dix, est en fait la meilleure et qu’elle continue son envolée vers les maximums de performance et d’agrément de conduite.

Une EVO, pour moi, une EVO pour toi…

L’EVO sera offerte en trois modèles, soit la GSR, la MR et la MR Premium. La nouvelle EVO utilise la même structure que la Lancer 2008. Elle reçoit évidemment des renforts à des endroits stratégiques, en plus d’un panneau de toit en aluminium en remplacement de celui en acier afin de réduire le poids de la voiture et, du même coup, baisser le centre de gravité. Comme certains des renforts se retrouvent entre les tourelles d’amortisseurs arrière, la banquette arrière n’est plus repliable. De plus, les réservoirs de lave-vitre et de fluide hydraulique, ainsi que la batterie, sont localisés dans le coffre; le volume en est donc passablement réduit. Oubliez un voyage de ski avec votre EVO, à moins de mettre vos planches sur le toit. Par contre, après cinq minutes au volant de l’EVO, ce petit détail sera sans importance.

L’habitacle de l’EVO est identique à 95 % à celui de la Lancer normale. C’est donc dire que l’ergonomie est au rendez-vous et que la finition est plus qu’acceptable. L’instrumentation de l’EVO ajoute un centre d’information entre l’odomètre et le tachymètre. Ce dernier contient un indicateur de la répartition de la puissance aux roues du système S-AWC (Super All-Wheel Control). La cabine ne fait aucunement sentir aux passagers qu’ils se trouvent à bord d’une quasi super voiture tant l’environnement n’a rien de spécial. L’ajout d’une jauge à pression du turbo serait possiblement un atout à ce point de vue.

Avant de monter à bord de l’EVO, on remarque évidemment les superbes sièges Recaro. Ces sièges sont dotés d’un important support latéral et lombaire, idéal et parfait pour la piste tout comme la rue. L’autre indice révélant au conducteur, s’il n’a rien noté à l’extérieur bien entendu, qu’il ne se trouve pas à bord d’une Lancer régulière est le volant sport qui n’est malheureusement pas, soit dit en passant, télescopique.

Inspirée par Jaws

La nouvelle EVO est plus grosse de partout que l’ancienne EVO IX, tout comme les nouvelles Lancer 2008, sur laquelle ces voitures sont basées. La calandre avant, avec sa grosse grille béante, ses phares profilés et la profondeur du pare-chocs, s’inspire carrément d’un requin et ça se voit. Les ajouts à la carrosserie qui différencient l’EVO de la Lancer GTS sont un ensemble de jupes plus évidentes, des prises d’air sur le capot et derrière les roues avant et les roues elles-mêmes. La version GSR testée roule sur des jantes de 18 pouces en alliage fabriquées par Enkei, tandis que les MR utilisent des jantes plus légères conçues par BBS. Le becquet arrière est le même que l’on retrouve sur la GTS. La MR est dotée d’un aileron plus gros et plus haut.

Tous ces éléments font de l’EVO une bagnole méchante et agressive. Du dessus, la voiture démontre la largeur de sa voie qui n’est pas seulement utile à son look. La MR arbore des accents de chrome et des phares au xénon, deux autres particularités qui distinguent la MR de la GSR. Selon moi, la GSR garnie de noir, mais dotée des jantes BBS de la MR et peinte en blanc, est de loin l’EVO la plus hot! Malheureusement pour nous Canadiens, nous devons vivre avec une bande de plastique noire ajoutée aux pare-chocs arrière pour rencontrer les normes; cette bande n’a vraiment rien d’esthétique.

Les attentes face à une EVO

Si vous êtes comme moi et que vous suivez l’évolution de l’EVO depuis le milieu des années quatre-vingt-dix, l’arrivée de cette dernière est comme le retour d’Elvis. Depuis le temps que je rêvais de conduire l’EVO, j’ai tout de suite su, au moment où j’ai vu les photos de l’EVO X il y a près d’un an, que le destin m’amènerait à me retrouver derrière le volant de ce bolide fétiche. Côté stylisme, c’est réussi à 98 %; seul le pare-chocs arrière…

Maintenant, passons à la mécanique. L’EVO ne peut avoir qu’un moteur turbocompressé de quatre cylindres de 2,0 litres. Développant 291 chevaux et 300 lb-pi de couple, le compte est bon. Traction intégrale? Oui. Boîte manuelle à six rapports? Oups. Boîte manuelle automatisée à six rapports? Oui, mais reste à voir. Puissants freins Brembo aux quatre coins? Oui, messieurs. Une suspension sport complexe et des pneus haute performance uniques au véhicule? Parfait! Un bilan comme celui-là laisse présager de très bonnes choses…

L’EVO est une voiture qui se conduit en se prêtant aux moindres désirs du pilote, chaque impulsion des mains ou des pieds se traduisant en un sourire instantané. C’est fou comment l’EVO est compétente partout, sauf sur l’autoroute. Je passe donc aux points plus négatifs, mais ce sera court, ça, je vous le promets.

Plus haut, j’ai mentionné que la seule transmission manuelle offerte chez l’EVO n’a pas six rapports, mais qu’elle n’en contient que cinq. Vous vous dites : «Ce n’est pas grave.» Mais je vous annonce que sur l’autoroute, à 120 km/h, le moteur révolutionne à près de 4 000 tr/min puisque les engrenages sont très rapprochés. C’est très déplaisant, d’autant plus que le moteur ne jouit pas d’une sonorité musclée ou même divertissante. L’autre hic concerne la position de conduite : le volant n’est pas télescopique et le banc Recaro n’est pas ajustable en hauteur. Si je ne suis pas le seul à relever ce point faible, je crois par contre qu’il est tout de même possible de s’adapter à la voiture.

Un outil de précision

L’EVO dispose de l’une des meilleures tenues de route que j’aie eu l’occasion d’essayer. Si des voitures comme l’Audi TT et R8, la Mazda RX-8 et MX-5, la BMW M Coupe et même la Porsche 911 ont toutes un comportement routier exemplaire, celui de l’EVO est tout simplement phénoménal. De toute évidence, le moteur excelle quand c’est le temps d’accélérer; le retard (lag) du turbo est minime et puis on s’envole. Le 0-100 km/h se boucle en moins de cinq secondes et les accélérations donnent l’impression que le véhicule que l’on dépasse est stationné. À quelques reprises par contre, j’ai remarqué une hésitation agaçante lors d’une accélération à fond, mais rien de très grave. Peut-être est-ce un problème de jeunesse?

Les prouesses extraordinaires de l’EVO sont le résultat d’une multitude de composantes coordonnées comme un orchestre symphonique. Que ce soit sur les routes sinueuses des collines du sud de la Californie ou sur le circuit routier de Willow Springs, l’EVO règne. Depuis la transmission, la puissance est acheminée au système ultrasophistiqué S-AWC et au contrôle actif du différentiel central, de la stabilité et du lacet (yaw); c’est la division électronique de la puissance entre les roues arrière. Lorsqu’en marche, la combinaison de toutes ces technologies rend l’EVO infaillible. À moins de se diriger directement vers un mur de ciment ou un précipice, le pilote ne peut qu’être impressionné par ses propres habiletés au volant tellement le système de contrôle est peu intrusif. Heureusement, le tout peut être désactivé au grand plaisir de ceux qui aiment prendre des petits risques.

Même dénudée de ses garde-fous, l’EVO fait preuve d’une adhérence tenace et d’une fluidité de mouvement que peu de voitures normales sont en mesure d’égaler. Dès les premiers instants, l’EVO se donne à cœur joie à toutes les exigences du conducteur. La réaction instantanée de la direction à un coup de volant est foudroyante. Une RS4 d’Audi ou une MX-5 de Mazda se réjouiraient de répondre aussi rapidement. La caisse et la suspension réagissent par un réflexe positif à un changement de cap. Les transferts de masse sont manipulés avec une énorme adresse et à aucun moment ne ressent-on que le chauffeur en demande trop au châssis de la voiture. La rigidité de la structure est appréciable non seulement par le fait qu’elle ne vous laissera jamais tomber, mais aussi parce qu’aucun bruit de craquement ne se fait entendre dans l’habitacle, peu importe la qualité de la route. L’unique défaut à prévoir de la suspension rigide, sur les rues du Québec, sera un niveau d’inconfort plus que probable. Sinon, sur un circuit ou sur les routes sinueuses de la campagne, WOW!

Les freins Brembo sont plus qu’à la hauteur des performances de la voiture. Même lorsque durement mise à l’épreuve, et ce, à répétition, la pédale du centre n’est jamais devenue spongieuse et les étriers avant à quatre pistons n’ont jamais souffert d’un moment de faiblesse. L’EVO MR utilisera des disques avant à deux morceaux, réduisant le poids non suspendu en plus de mieux dissiper la chaleur. Ce point m’amène à mentionner que la brillante GSR devrait être offerte avec un groupe d’équipement optionnel de performance composé des freins, des roues BBS et possiblement d’un système d’échappement moins restrictif. Un «Track Pack», mesdames et messieurs, de Mitsubishi?

La meilleure EVO de tous les temps?

Malheureusement pour moi, je ne serai probablement jamais bien placé pour répondre à cette question. Ayant lu énormément d’essais sur les EVO depuis plus de dix ans, je peux confirmer que l’intention de Mitsubishi de rendre l’EVO plus accessible est réussie. Elle est maintenant plus bourgeoise et vise une clientèle plus vaste. Les durs à cuire et les mordus de la voiture ne seront certainement pas déçus, mais ils ne retrouveront pas une EVO X qui leur est exclusivement destinée.

C’est de cette manière que Mitsubishi explique le groupe Premium (navigation, Bluetooth et toit ouvrant) offert en option avec la MR, ainsi que son audace à se mesurer dorénavant à des Infiniti, BMW et Audi. Le constructeur réussira-t-il son pari? Est-ce que l’EVO sera un succès? Sans aucun doute! La voiture est époustouflante à tous les points de vue et, de plus, c’est une légende. Pour les mordus de sensations fortes, seule la STI de Subaru s’en approche quant au prix. Du moins, c’est ce que j’espère découvrir lors d’un essai de la STI.